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Ọya Article//Oct 13, 2021

UEMOA|Energy - Infrastructure

Réglementation de l’assistance à maitrise d’ouvrage au Bénin

Le Bénin dispose depuis le 21 juillet 2021 d’un cadre réglementaire régissant les conditions d’exercice de l’assistant à maitrise d’ouvrage en matière de construction (l’« AMO »).

L’assistance à maitrise d’ouvrage ne doit pas être confondue avec la maitrise d’ouvrage déléguée (1) où, sur mandat du maitre d’ouvrage, le maitre d’ouvrage délégué exerce au nom et pour le compte de ce dernier, tout ou partie de ses attributions, à l’exception de celles relevant de sa mission d’intérêt général.

Malgré quelques imprécisions, répétitions et la présence de termes définis non utilisés dans le corps du Décret, les nouvelles dispositions ont le mérite de poser un cadre juridique aux activités de l’AMO et surtout de s’inscrire dans le respect de la directive n°02/2014/CM/UEMOA relative à la réglementation de la maîtrise d’ouvrage public déléguée au sein de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine du 28 juin 2014 (la « Directive »).

Les États membres de l’UEMOA avaient en effet jusqu’au 28 juin 2016 pour prendre les dispositions législatives, réglementaires et administratives pour se conformer à la Directive.

Dans l’attente de l’adoption des autres dispositions s’inscrivant dans le respect de la Directive (2), nous anticipons plusieurs problématiques telles qu’à titre d’exemple celle de la différenciation claire entre le conducteur d’opération dont l’exercice est déjà régi (3), et l’AMO. En effet, la pratique et l’analogie au droit français dont le droit béninois s’inspire fortement distinguent l’AMO (mission spécifique, spécialisée) du conducteur d’opération (mission d’assistance générale). Néanmoins, la lecture du droit positif béninois peut conduire à une interprétation selon laquelle ces deux corps de métier ont un champ d’application identique, mais avec des conditions d’exercice et responsabilités différentes…

I. Définition

Le Décret définit la mission d’assistance à maitrise d’ouvrage comme étant la mise à disposition par l’AMO, au service du maitre d’ouvrage, « de ses compétences administrative, technique et financière, ainsi que de ses expériences en matière de réalisation d’ouvrages publics ».

Le Décret précise que l’AMO joue un rôle d’assistance et facilitation à la coordination du projet, mais que le maitre d’ouvrage reste le seul décisionnaire dans le pilotage du projet.

II. Qui peut être assistant à maitrise d’ouvrage ?

Les entités morales et physiques suivantes peuvent être AMO :

1) les établissements publics ou les collectivités publiques ; 2) les cabinets « régulièrement constitués » dont les activités principales sont du domaine de la maitrise d’œuvre, de l’ingénierie ou de la maitrise d’ouvrage déléguée en matière de construction et ayant au moins cinq (05) années d’expérience ; 3) les personnes physiques « qualifiées ». Le Décret n’apporte pas plus de précisions sur ce que le mot « qualifiées » contient.

III. Comment est sélectionné l’assistant à maitrise d’ouvrage ?

L’AMO est sélectionné en application des dispositions prévues par le Code des marchés publics.

IV. Quelles sont les missions de l’assistant à maitrise d’ouvrage ?

Les Personnes Éligibles peuvent intervenir aux côtés du maitre d’ouvrage au niveau des quatre (04) phases suivantes :

Phase 1 : étude de faisabilité (comprend le phasage des travaux et la détermination de l’enveloppe financière prévisionnelle, l’aide à l’établissement du programme de travaux qui doit contenir certaines spécifications dont les contraintes et exigences de qualité sociale, urbanistique, architecturale, fonctionnelle, technique et économique, insertion dans le paysage, protection de l’environnement, qualité environnementale, suivant les principes de développement durable).

Phase 2 : conception (comprend la phase de consultation et du choix du maitre d’œuvre. Elle est composée :

  • du suivi des études ;
  • de l’assistance à la gestion des marchés des prestataires intellectuels ;
  • de l’assistance à la consultation des entreprises ;
  • de l’assistance de la consultation des concessionnaires ;
  • de l’assistance à la dématérialisation des marchés.

Phase 3 : travaux. Elle comprend :

  • la participation aux diverses réunions de cadrage avec les acteurs du projet ;
  • l’assistance à la rédaction des projets d’avenant ;
  • l’assistance à la gestion de l’agrément des sous-traitants des marchés de travaux ;
  • la participation et l’animation des réunions entre le maitre d’ouvrage et le maitre d’œuvre, y compris la rédaction des comptes rendus ;
  • le suivi de la production des devis quantitatifs et estimatifs ;
  • la vérification de l’organisation proposée par le maître d’œuvre pour la réception des ouvrages.

Phase 4 : réception et mise en service. Elle comprend :

  • l’avis sur les propositions de réception du maitre d’œuvre et le suivi de la levée des réserves ;
  • le suivi de l’élaboration et de la transmission des plans de recollement par le maitre d’œuvre ;
  • la mise en place du cahier de parfait achèvement ;
  • l’assistance à la gestion de la garantie de parfait achèvement ;
  • l’assistance à la mise en place de la garantie décennale ;
  • l’assistance aux procédures de clôture d’opération (commission de sécurité).

V. Comment formaliser les relations entre le maitre d’œuvre et l’assistant à maitrise d’ouvrage ?

L’AMO est lié au maitre d’ouvrage par un contrat d’assistance à maitrise d’ouvrage (le « Contrat d’AMO »). Il est important pour l’AMO de veiller à la bonne rédaction de son contenu, sous peine par exemple de tomber sous le coup d’une requalification du Contrat d’AMO en contrat de maitrise déléguée ou encore de maitre d’œuvre, ou bien de se voir opposer la responsabilité décennale des constructeurs…

VI. Quelle est la rémunération de l’assistant à maitrise d’ouvrage ?

La rémunération de l’AMO, qui doit être fixée dans le Contrat d’AMO, doit tenir compte de deux facteurs :

  • l’étendue de la mission ;
  • le coût prévisionnel de l’opération, lequel est basé sur l’enveloppe prévisionnelle établie par le maitre d’ouvrage.

Le Décret indique que la rémunération de l’AMO est située entre 0,5 % et 2 % du montant total « des sommes à payer aux différents prestataires devant intervenir dans le cadre de la mise en œuvre du projet » (4).

VII. Quelles sont les responsabilités de l’assistant à maitrise d’ouvrage ?

L’AMO doit contracter une garantie des risques professionnels et est tenu de fournir une caution bancaire couvrant les avances sur ses honoraires (sont dispensés de cette dernière obligation les établissements et collectivités publics).

Le Décret indique également que la réception définitive des travaux et fourniture n’exonère pas l’AMO de l’engagement de sa responsabilité au titre de sa mission. Le Décret ne précise cependant pas les contours de cette responsabilité, notamment en matière de temporalité.

Enfin, le Décret indique expressément que l’AMO n’engage pas sa responsabilité contractuelle dans les cas suivants :

  • faute du maitre d’ouvrage ;
  • cas de force majeure ;
  • fait d’un tiers (prestataire par exemple…).

(1) - En l’état des informations disponibles, la maitrise d’ouvrage déléguée est régie par le Décret n°2010-266 du 11 juin 2010 portant conditions d’exercice des missions de maitrise d’ouvrage déléguée et de conduite d’opération. Il faut ajouter à ce décret la loi n°2001-07 du 9 mai 2001 portant maitrise d'ouvrage publique et la loi n°2005-07 du 8 avril 2005 modifiant et complétant la loi n°2001-07 du 9 mai 2001 portant maitrise d'ouvrage publique. (2) - Sont en préparation : un avant-projet de loi portant maitrise d’ouvrage publique en République du Bénin, un projet de décret relatif aux missions de maitrise d’œuvre confiées par des maitres d’ouvrage publics et un projet de décret portant conditions d’exercice des missions de maitrise d’ouvrage déléguée et de conduite d’opération. (3) - Articles 23 et suivants du Décret n°2010-266 du 11 juin 2010 portant conditions d’exercice des missions de maitrise d’ouvrage déléguée et de conduite d’opération. (4) - Article 9 du Décret.

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